Présentation
Flaubert et Louise Colet
L’amour en poste restante
Le 28 juillet 1846, Gustave Flaubert, une force de la nature, rencontre Louise Colet dans l’atelier du sculpteur Pradier. De dix ans son aînée, elle est plus connue pour ses frasques et son caractère enflammé que pour ses vers et ses romans. Lui-même sacrifie au « fanatisme de l’art », unique consolation au « ridicule intrinsèque à la vie humaine ». Mais il n’a encore rien publié.
Le coup de foudre est immédiat, violent, dévastateur. Louise va-t-elle s’offrir corps et âme à ce jeune homme de vingt-quatre ans ? Pourquoi Gustave s’enfuit-il au bout de trois jours en Normandie, la laissant à sa déconvenue ? S’il l’a déjà oubliée, pourquoi lui écrit-il : « Tu as un pouvoir d’attraction à faire dresser les pierres à ta voix » ? Combien d’années pourra durer ce manège d’eau et de feu ? Et qui est donc cette Emma, à laquelle il consacre bientôt ses jours et ses nuits ?
Lettre après lettre, Joseph Vebret retrace l’histoire d’une passion aussi tumultueuse que féconde par la correspondance amoureuse qu’elle a fait naître, l’une des plus belles des lettres françaises.
« J’aurais voulu passer dans ta vie comme un frais ruisseau qui en eût rafraîchi les bords altérés, et non comme un torrent qui la ravage ; mon souvenir aurait fait tressaillir ta chair et sourire ton coeur. Ne me maudis jamais ! Va, je t’aurai bien aimée, avant que je ne t’aime plus. Moi, je te bénirai toujours ; ton image me restera tout imbibée de poésie et de tendresse, comme l’était hier la nuit dans la vapeur laiteuse de son brouillard argenté. »
Lisant ces lignes, Louise sent monter en elle un agacement qui fait suite à l’incompréhension. Puis la rage. Eh quoi ! l’une des plus belles femmes de Paris, poétesse célèbre, couronnée par l’Académie, admirée et courtisée, s’offre sans retenue à un jeune provincial de passage… et voici qu’il fait la fine bouche !