Présentation
La fille d’Ulysse : Je ne suis pas Cassandre. Je ne suis pas prophètesse mais je sais que nous allons nous revoir. Deux fois. Une première, en famille, à croire que je rendrai visite, une bonne fille soucieuse de ses vieux parents. Une seconde, la dernière, je te verrai, en guerrier fier et suffisant, en bon fils, sans que tu ne me voies. Je te verrai traverser la rivière et foncer sur moi en gueulant.
Ce jour va arriver. C’est absurde ? C’est certain. Un jour terrible. Mais lointain, ce qui nous laisse à l’un et à l’autre le temps d’une vie heureuse.
Il vaut mieux le voir comme cela.
Le temps n’est pas une flèche. Le temps est rond. Il dessine de grands cercles par-dessus les âges de nos petites vies et nous nous retrouvons dans d’autres corps, inconscients du passé, pour continuer nos histoires, pour qu’elles se disent jusqu’au bout, jusqu’à ce qu’elles soient vraiment terminées, jusqu’à ce qu’elles disent tout ce qu’elles avaient à dire et nous avec.
Ne ris pas de ça. Les mots que je pose dans l’ombre sont restés là pour que tu les entendes, comme je te l’avais promis.
Ne ris pas de ça. Il existe des chemins si longs que nous ne pouvons les comprendre.
Ne ris pas de ça. Ta petite soeur gommée te dit : rien n’est terminé.
Héros de L’Odyssée, Ulysse a un fils, Télémaque ; il éloigne ceux qui veulent épouser Pénélope.
Dans l’ombre du « bon fils », imaginons une petite soeur qui remet en question la légende, refuse le mensonge, conteste l’ordre établi. Elle ne fête pas le retour du père mais pleure, avec le petit peuple, ses compagnons de route qui ne reviendront plus.
Elle tente de convaincre son frère d’aller chercher, ensemble et ailleurs, le chemin de la vérité. Mais elle sait qu’il ne viendra pas. Si unis dans l’enfance, devenus si différents aujourd’hui, ces deux-là ne se reverront pas ; ils partageront pourtant le même destin tragique.
En nous proposant un grand pont dans le temps, l’auteur suit les enfants d’Ulysse. Il les prend au retour du héros à Ithaque – la fin de L’Odyssée – pour les amener jusqu’à notre époque contemporaine. L’occasion de vérifier que les révoltes de la jeunesse traversent les siècles.