Présentation
Des astres errants
Il s’agit, ici, de passer du poème, soit, pour moi, son resserrement, à la prose, comme respiration élargie, le souffle, cependant, çà et là, se raréfiant. Prose, ainsi, au sens où Mallarmé dit que « vers il y a sitôt que s’accentue la diction, rythme dès que style ». Quant à la narration, à chaque fois, elle naît de l’ébranlement d’une première phrase, son retentissement, une expansion s’ensuivant. Par ce commencement, le récit requiert sa tonalité, son espace, son climat propre. Délimite une aire souveraine de lecture. Dans son scintillement propre, toutefois, formant, avec les autres, comme une constellation.
Ma main ne faiblit pas. Je tiens fermement la plume. Les doigts crispé, même, sur son bec. Non que je craigne de l’échapper… une plume est si légère et la mienne, si j’ose dire, frémit encore du vent des vols anciens. Ou n’est-ce pas plutôt moi qui lui communique mon anxiété, tellement j’ai peur de me tromper, estropier un nom qui entrerait boiteux dans la chronique. Cela seul me fait serrer trop fort cet instrument funéraire qui m’est devenu un prolongement aussi naturel qu’à l’oiseau et dont j’ai oublié quand j’ai commencé à m’en servir. Le crissement de la plume sur le papier est donc le bruit de fond de ma vie en sous-sol. Accompagné, de loin en loin, du battement régulier des rames sur le fleuve.
Six textes percutants qui démontrent comment la poésie peut s’alimenter d’une prose tranchée et mystérieuse. Mais s’agit-il vraiment d’un genre littéraire puisque le poète unit l’aimant de la mort avec le souffle égaré, éclairé de la vie… L’arbre de vie et de mort est aussi un acte littéraire plein, reconnaissable entre toutes les nuits qui ceinturent la pleine lune.