Présentation
À chaque instant nous vivons l’exil. Exil de l’existence passée, des lieux et des temps qui furent les nôtres. Nous vivons chaque jour sans cesse tendus vers une impossible coïncidence. « La parole, dit Juan Gelman, comme l’utopie, est l’incessante émulsion d’une double perte – ce qui est désiré, ce qui est obtenu – Un paradis qu’on n’a jamais possédé. Le paradis perdu est devant, non pas derrière, et il nous fait sentir la perte de ce qui n’est pas. »
Dans cette perspective, la poésie de Gelman ne pouvait pas ne pas rencontrer sur son chemin la mystique. Ici celle des écrivains mystiques judéo-espagnols. Ces poèmes du passé, Gelman les « com/pose » d’où le titre du livre : « Com/positions » dont il dit : « j’ai offert – cela que j’éprouvais moi-même ; comme contemporanéité et compagnie ? la mienne avec eux ? ou l’inverse ? habitants de la même condition ? ». Aussi la voix qui parle est-elle indissolublement l’autre de toutes les voix et leur mémoire immémoriale.