Présentation
La poésie d’Emmanuel Merle nous plonge dans le passé, à une époque où un chevalier, Perceval, interroge son rapport à la terre, à la vie, à la mort. Cet homme est sans mots, muet, et le poète lui prête les siens pour dire le monde qui l’entoure et son monde intérieur. Perceval se fond dans la «terre veuve», la «terre foraine» qui est pour lui à la fois génitrice, amante, et lieu du dernier souffle. De la puissance de l’écriture naissent des images fortes, extrêmement précises : le paysage brut, blanc tâché de rouge, les arbres, les ravins, les lacs, les torrents, les pierres apparaissent comme sur une photographie venue d’un autre temps. La nature agit sur l’homme comme un révélateur de ses forces, de ses fragilités, de sa condition, un miroir à travers lequel le chevalier privé de mots peut exprimer ce qu’il ressent. L’approche de la mort, la rencontre de la souffrance, lui redonnent des souvenirs, une présence, une perception aigüe de ce qui l’entoure, des antennes pour capter le monde et les questions essentielles de l’existence. Un poème profond et dense, servi par une écriture ciselée, magnifique.
J’avais chevauché toute la nuit, et entre les bras des arbres je sentais la torche de la lune, froide et blanche, dévorer mon armure. Ma monture appartenait à la terre, la vie n’était plus que ce sourd et lourd galop, cet alphabet de quelques sabots prenant et rendant au sol son langage.